jeudi 26 octobre 2017

Rebond (5)


Roseaux



Roseaux
herbes debout
longeant la bouche
un fleuve émerge
sous la langue
qui échappe 
aux berges au bout
elles se touchent

Du vent plie les saules
encore du vent
les obliques

mercredi 25 octobre 2017

J'étais devant le fleuve



J'étais devant le fleuve
encore
et j'invoquais les rives
herbes couchées hérons gris
profils de corbeaux chiens fébriles
comment dire ?
Tant seront perdus
par manque de tout !
Sens, il n'y a pas, temps et bientôt le sang
on n'entend pas le corps
qui coule
lui sans rive.

Rebond (4)


mardi 24 octobre 2017

Rebond (3)


Gris de zinc




Gris de zinc
jaune d'onagre
rouge corail, l'heuchère pluie de feu
(quelques gouttes seulement, une giclée)
sur les dalles grises

une autre couleur
sangs incessants
le chant lymphatique

lundi 23 octobre 2017

L'allée (comme elle nous paraît proche)



L'allée (comme elle nous paraît proche)
l'onagre remonte
si forte
lame
jusqu'à nos pieds
jaune son
excipient
odeur d'amande
que nous cueillons
assis exsangues 
essoufflés

Rebond (2)



dimanche 22 octobre 2017

Rebond


Tandis que goutte sur la dalle



Tandis que goutte sur la dalle
la dernière
rouge-flamme
larme de feu si brève du désespoir
du peintre lequel en haut s'escrime à peindre
ce qu'il ignore
qu'il ne voit pas
encore l'exprime

vendredi 20 octobre 2017

Les"chahuts" (8)


Lumière admirable



Lumière admirable
orange entre les franges
des sapins grincent (froids vaisseaux d'ombres) dans l'immense
coulée de terre sèche
et d'aiguilles
je vaque


 

mercredi 18 octobre 2017

Permettez que je joue



Permettez que je joue. Permettez que je m'octroie, c'est un temps repris sur l'injonction de tout, un temps "ajouté", que je m'octroie quelques secondes interrogatives pour rien, pour suivre un chien, ou un nuage, pour obéir à une feuille, permettez. Une plume éveille une plage ou bien un arbre parle. Un sphinx sans énigme arrêté sur une toile d'émeri, une lentille concave cerclée de fer échouée sur la lame d'un parquet, et qui rayonne, trois galets posés très loin de leur lit… La lune abrupte blanchit le gravier de la cour, et je dors bientôt, reconnaissante à mes paysages.

> Adèle Nègre site

mardi 17 octobre 2017

Les "chahut" (7)


Grande courbe du



Grande courbe du 
( ligne qui joint tous les points d'une même altitude )
niveau des eaux
pensées flottantes désossées,
des bois, sources sanguines inconscientes, jaillissements sonores
vers le haut volent toutes sortes de cris
tandis que je descends dans mon sang :
et sans chercher je vois
quoi dire

lundi 16 octobre 2017

Un chien aboie



Un chien aboie, ils sont sept
à entretenir la peur.
Les grands sapins secouent la lune
intermittente
sur la dalle de ciment,
et dans l'eau noire des bols
toute la membrure du chenil consent et louvoie.
Je cale ma respiration sur celle, plus lente,
du ciel où gonflent les nuages circonscrits
dans le golfe sombre des bois.

Les "chahut" (6)


samedi 14 octobre 2017

Les "chahut" (5)


Tout est calme



Tout est calme,
je regarde la cour
elle brille sous la lune brève.
Mouillées par une pluie que je n'entends pas
les ombres tombent dans les ombres différentes que sont les arbres,
avec des feuilles
et obturent, force de la nature qui ne tarit pas,
les pierres autour d'un feu que j'allumerai demain.
Le profil de tilleul grandit dans l'allée,
émerge la face de la noyée.
"La nuit donne à mon ombre sa matière"
La lune inonde.

jeudi 12 octobre 2017

Il me semble que le fleuve s'allonge



Il me semble que le fleuve s'allonge aujourd'hui paisible
et passivement 
se laisse descendre et remonter sous la courbe des ponts, les boucles des saules et des vignes rouges ainsi que la blancheur vibrante des façades à peine démêlées dans l'eau calme par les passages répétés - voyantes traînières aux avirons scandés par la timbale -
que voilà un tableau édifiant - oh, la belle journée de ville et comme nous savons rentabiliser nos eaux, nos rives, nos cœurs - muscles profitez, fortifiez, poumons respirez en rythme !
Par-dessus courent les coureurs - nuque forcée, mâchoire devancière, pliez os ! - et les chiens, mais bien moins disciplinés.
Je m'incline pour voir le héron patient sous un saule, debout sur sa jambe grêle. Les berges au loin joignent leur végétation dans la poudreuse, sous les roches hautes et roses de la citadelle, amenuisent le point de fuite, d'issue aucune.

Les "chahut" (4)


mercredi 11 octobre 2017

Ce sont de sombres mains



Se sont de sombres mains ajourées
étrangères à mes bras
dont la danse ressuscite la saison
le soir l'obscurité des voix
les visages non décisifs
posés dans la chevelure de vent

Les "chahut" (3)


mardi 10 octobre 2017

Mes mains dans la lumière



Mes mains dans la lumière divise éparpille
suspensives
toute l'unité de la journée
tournée sous le tilleul
elles font et défont seules
l'énigme des galets

Les "chahut" (2)


lundi 9 octobre 2017

De jour, assise sous le tilleul



De jour, assise sous le tilleul, l'ombre accroche sur la table ocellée les reliefs de l'été : quatre galets de rivière ballent parmi les ocelles, dont on ne sait lesquels ont le plus de poids, lesquels ont pressé les pages d'encre, pierres ou roches lèges, c'est à voir, averse dans les yeux suspicieux. Lesquelles. Je soupèse aussi et mes mains mouchetées rejouent cette neige.

Les "chahut"


vendredi 6 octobre 2017

Aujourd'hui



Aujourd'hui
un vif soleil mûrit les figues à l'arbre
les branches penchent jusqu'à terre, nourrie du lait, de l'eau, et du sucre des fruits tombés, non ramassés,
l'herbe fourmille, le liseron progresse encore dans les asters, poursuit l'ascension des tiges qui plient, nos os plient,
à genoux sur le gravier,
la soie du liseron, de coupe en coupe plus pure dans les astres défroissés, plus près du soleil, s'extrait du massif noirci, la fin de saison somme,
je cherchais aveugle, aveuglément je marchais cherchant sur le chemin, tout était là évident, évidant le "gouffre toi", cette sorte de désastre, tout était là pour prendre place dans le monde et la prit, poursuivant, c'était d'accepter de poursuivre qu'il s'agissait…
Et maintenant,

dehors existe par mes yeux, (très concrètement) il suffit que je le veuille, nommer les choses, feuille, pierres de calcaire coquillier, treille au dessus de la porte, et la porte, feuilles encore, décomposition dans les flaches…
Un escalier au soleil où faire ample cette danse avec les branches et la foule des détails.
Aller au bout de la fatigue.

Ont fait irruption : trois sphinx tête de mort, l'un deux a crié lorsque je l'ai poussé vers la sortie, un HiHi sifflé aigu, et trois grillons ce soir, errant reclus dans leur tête noire.

Serment (8)




jeudi 5 octobre 2017

Serment (7)



Où aller, pour quoi faire ?



Où aller, pour quoi faire ?
Une toute petite chose m'anime à l'instant, mécanique des courants, son avant-bras dénudé, sa main délicate - pouce et majeur disjoints sur le mégot, ses yeux plissés pour jouir des poumons sans pleurer - apportant au visage l'infime braise, puis la bouche expirant, cette légère fleur de gaz qui éclot entre mon œil et le tilleul qu'elle voile, tout danse lentement, le tilleul aussi,
le nuage physique et logique de nos jeux recouvre l'effroi, ces images que je me rappelle sans cesse autant que les visages oubliés, l'injonction de mémoire et la sommation de connexion se perdent dans cet instant, divaguent un moment au lieu du feuillage troublé, de branche en branche palpitant, la nuit respire, c'est palpable, et nous balbutions heureusement : la beauté rigoureuse est là dans ce trouble évident, émergeant de la nuit par l'extrémité rougie d'une cigarette dans la corbeille imparfaite d'un tilleul, l'effort mis à cela, sûrement, la preuve par la sensation ou le fumeur ?
Vision envolée, où les mots ? S'étiolent à même les doigts. Où sont passées lune et feuilles changeantes, veuille perdurer comme cet arbre de miel cliquète, la source de mon rêve… Veuille, veuille !

mercredi 4 octobre 2017

Serment (6)



Comme tu fumes



Comme tu fumes calmement devant la porte
en regardant le tilleul
ou la nuit
ou la nuit où elle perce le tilleul
il jaunit et vacille
projeté sur le mur
et sur le toit
à rebours
le vent noircit les feuilles
toi expirant ce gouffre
ta main porte vers ton visage le seul
point d'incandescence
que tu ravives
et je l'accompagne