samedi 30 novembre 2019

Souvenir d'Afrique 41


Petit monde


Petit monde - un mur exigu à l’aplomb du lampadaire
d’un jaune sali décrépi par endroits l’enduit de mortier grossier
s’égaye sous lui, cette incontinence m’effraie - aux grands reflets.

La pluie gifle la joue d’une plus vive obliquité dans la lumière, déjetée
par la gouttière. Regard en biais. Il parcourt la façade comme un livre
et demande le langage en est-il perturbé ?

D’ailleurs les jouées sont embuées le dessin moins net
des ombres - vous m’en direz tant arrive le froid par l’est il neige en plaine et
sur les reliefs est une rengaine bien rodée presque

un exécuteur testamentaire - ce qui ne dit pas, non, loin de là,
l’euphorie d’être vivant dans le langage près de la fenêtre,
à lire tout simplement quand arrive l’hiver

vendredi 29 novembre 2019

Souvenir d'Afrique 40


Ce ne sont pas des spectres


Ce ne sont pas des spectres mais des êtres vivants
occupés à transmettre encore le patrimoine génital.
Occupés - comme nous tous - à transmettre.
Héritage pour le compte de
                              nature - qui nous somme et qui est nous -.
Voici que peut-être ma volonté même d’être là, de voir et de témoigner,
fait partie intégrante du génotype.
Que peut-être les phalènes, et moi, sommes enchaînées ici au réverbère
par la reproduction et la contemplation.
Que la littéralité au pied de ce mur déroute.
( cependant avec le temps le voyage prend du sens
comme s’il était nôtre ?)

Qu’en restera t’il ? Des images, un jeu : mouvement dans un espace défini.
Et un nombre certain d’arpenteuses auxquelles il me faudra disputer,
au prochain printemps, pommiers et cognassiers

jeudi 28 novembre 2019

Souvenir d'Afrique 39


Blancheur radiante


Blancheur radiante. Attente de concert sous le lampadaire
où les phalènes spéculaires inondent la vision.
Mon gouvernement dans la nuit me commande de rester, encore,
à l’exposition.
La lumière l’exaspère - comme elle exaspère le mur entier dans le halo -.
L’ attente la consume patiemment.

De brèves ombres dans le verset qui s’avèrent pour l’œil
- comme un mystère qui reste présent -
( c’est toute la distance entre les corps )
de petites ombres portées.

mercredi 27 novembre 2019

Souvenir d'Afrique 38


Oh je pâtis vraiment


Oh je pâtis vraiment, ou je dois dire véritablement,
de voir les phalènes, les unes rampant
comme atrophiées, les mâles papillonnant lamentablement
à l’opposé. Chacun tire de son côté.
Mais c’est la vie sur ce mur éclairé      la vie qui
perdure ainsi, radicalement
                   La nature trouve toujours simplement une autre issue
Oui c’est ça ! Ce qui a été sera             nouveau
résiduel et résurgent
comme l’eau

comme j’aurais aimé te parler de cette eau.
Mais déjà je ne te vois plus.
( pourtant ce ne sont pas des spectres que je regarde là )

mardi 26 novembre 2019

Souvenir d'Afrique 37


Je tente de me gouverner à la nuit tombée.


Je tente de me gouverner à la nuit tombée.

Je scrute la fiabilité des imagos comme
une survivance : l'imago est réellement adulte,
c'est-à-dire qu'une fois cette forme atteinte,
l'insecte emprisonné dans sa dernière enveloppe de chitine
ne peut plus grandir. - Comme d’une tunique, dans le cas du papillon comme
d’une splendide robe membraneuse d’écailles poudreuses, des soies aplaties
dont l’épaisseur approche la longueur d'onde de la lumière visible -
Ici encore papillonne un transi dans sa tunique définitive,
résolu à                       va-vaciller
sous la lumière artificielle.

Ce que je ne suis-suis pas ! Pas de battement prostré,
de paillettes, ni de robe vespérale, je me rassure,
et si j’ai des leurres, comment l’éviter ?
Aveuglements provisoires, oui, peut-être.
Souvenance, science naturelle, tu surprends ma course.
Me suspends, entre arpenteuse et brumeuse.
Gagnerais-je des égards à me mouvoir
sous cet ordre ? Je me pose la question.
Je forme le vœu que la robe grandisse avec moi
mémoire et faits tissés avec les sensations, sans réfutation.
Et de risquer une forme. Il n’y aura pas de consolation.
Tout est là devant-moi.

lundi 25 novembre 2019

Souvenir d'Afrique 36


Pas de phalène et nulle hibernie


Pas de phalène et nulle hibernie
j’ai trouvé à la nuit des luminosités.
Pour solution de continuité
il y a cette brèche. Vent et pluie en suspens.
Et juste les faits.
Les en-têtes et les grands réverbères de ton imagination
sont-ils ton unique réel
comme si tu étais des leurs ?
Ce que cela signifierait ?
Toute ouïe je suis des leurs - et non des leurres -

Ailantes fléchies, vacillantes
à peine, feuilles collées, roses incurvées
- bravoure des arcs amortis - des angles
glissent ruisselant depuis les hauteurs.
J’arrive sous un autre halo.

l’obsession de se rapprocher de lui :
le motif, c’est le motif, et je fraye l’accès
dans la nuit, je cherche
l’ombre marbrée, la terre bigarrée
l’imago d’arpenteuse, de défeuillante, désir et
frayeurs de rêves vers lesquelles je penchais

les lentes femelles aptères attendent
à la lumière artificielle - ce sont des Géométridés
- des hétérocères selon l’ancienne classification -
aux mœurs nocturnes - l’élusive copulation
sur les fûts des lampadaires s’il le faut.



dimanche 24 novembre 2019

Souvenir d'Afrique 35


Ruissellement cristallin


Ruissellement cristallin une fois
les arbres tus
dont les branches vers moi
- tête à l'affût du vent -.
Au loin je sais la forêt murée
impénétrable et unifiée après avoir été pétrie
- ou pétrifiée -   
dans la rudération nocturne.
Je vois dans le pré les veaux clairs
comme des éponges qui bouclent
sous la lune mufle posé rose
sur leurs jarrets enroulés.
Et défilent les longues grumes au fossé 
luisantes comme des canalisations
de plomb exhumées.
Des roses encore, mais sans feuilles, aux jardins
s’inclinent sur les clôtures lasurées
enfouies dans les mufliers Gueule-de-loup
- ou Gueule-de-lion
tout dépend ce qu'on attend
de la nuit -.         Le voici le lion écumeux
de la lune noire, mufliers par vagues montueuses
qui viennent se coucher dans mes jambes en bruissant !
Hécate !

ô, danse avec moi
                  O,
                            danse
                                           avec moi !

Veux-tu ?

Mais je me mets à courir et prends de l’erre.
Et en suivant la direction de l'inclinaison moi aussi
en suivant la pente
l’obliquité devient une nature
tout en ouïe et en foulée, oui !
- Un air.
Si je m'arrête, il s'arrête
comme la lune.                       
- Que je fais taire.
Je cours derrière mon ombre qui cahote 
sur le bitume, inspirant l’air froid
mon ombre qui s’étend comme je m’éloigne
du réverbère.

Les faits concordent justifiant la fuite.

vendredi 22 novembre 2019

Souvenir d'Afrique 34


Car l'herbe noire, je la connais


Car l'herbe noire, je la connais
je connais l'obscurité,             comme je connais 
les isolements.
Ronces au revers argent.
Les eaux noires au caniveau
dans la pente abrupte
dévalent
avec des bruits d'oiseau insolites
et des petits morceaux de miroirs.
Où es-tu ? La clarté sur le trottoir
se trouve là entre les réverbères
c'est - d'un timbre clair la ballade
explicite -

jeudi 21 novembre 2019

Souvenir d'Afrique 33


Je ne sais plus très bien ce que j'ai vu.



Je ne sais plus très bien ce que j’ai vu.
Il avait plu, des doutes sous la forme d’ombres
agitatrices dans les bouleaux et les peupliers noirs
grondaient encore d’une manière équivoque.
Le noyer majestueux dans le pré
l’indulgence de son ombre plénière - nuit redoublée -
repose de tout. Quelquefois c’est ainsi, la nuit vireuse,
le réverbère n’éclaire que sa verticale inconnue.

mercredi 20 novembre 2019

"Mort d'un naturaliste" 2



Voilà ce qu'Amelia Rosselli écrit



Voilà ce qu’Amelia Rosselli écrit dans Document,
page 12 : Rire n’est pas toujours amer… peut-être l’air
écrit sur la magie, les miracles, les détentes
les caractères qui sont urgents d’amour.

Vérité qui renais quelle tumeur inespérée
est là qui m’assaille avec toi en courant
sur des routes tumultueuses ?

À peine sortie j’ai compris cela ma volonté
battue en brèche, j’étais perdue et trempée.
Des grandes ombres pourfendaient les murs
et la route, plus noires que la nuit-hécatombe.
Doute et tumulte à perdre aussi l’haleine
dans cette pluie tempétueuse, glaciale.
Où la lune me conduira t’elle ? Je cherchais seulement
sous le réverbère les ombres marbrées 
de nos soirées : hibernies et phalènes.
Non loin de la maison au premier croisement
je n’ai pas pu voir le lion, bien sûr, dans la figure
tricéphale du réverbère, seulement un chien, et la jument.

mardi 19 novembre 2019

"Mort d'un naturaliste"




Ni phalène ni hibernie


Ni phalène brumeuse ni hibernie -
que de toute manière je ne suis pas en mesure de distinguer -
elles qui viennent d’ordinaire ici s’attendre sous nos yeux,
à la lumière du réverbère. Tu viens ? Ce ne sont que jeux
de séduction et d’amour. Hécate protectrice des âmes
perdues dans la tempête, je te consacre le peuplier
noir - nègre en vérité - qui tremble là-bas comme une flamme
dans la nuit. Toi, triviale, qui reliait ciel, terre et enfer
permets à la phalène d’incarner encore un peu la vie à notre mur
- et sous ta torche -.

lundi 18 novembre 2019

Souvenir d'Afrique 32


Je te parle seule.


Je te parle seule.
Hiémale acceptation, je parle seule avec tu. J’écoute
des leurres.
Ce soir le vent éperdument ouvreur
prend toute la place entre nous.

Pas même d’hibernie au miroir.

dimanche 17 novembre 2019

Souvenir d' Afrique 31


Assez de salive dépensée


Assez de salive dépensée, assez
de pensées de paroles sans objet que l’air - en l’air
en bayant aux sittelles - et bâillant, bah !

Mais les sittelles ?
Elles virevoltent sans se soucier
de moi accroupie à sarcler
se poursuivent en longs trilles sonores
escaladent le tronc des cerisiers, perpendiculaires
montées et descentes tête en bas.

À l’aisselle des branches il y a les noisettes percées
les bris d’écorce, tous les reliefs de leur vie facile.
Je pense à l’épeire diadème sur le plancher.
Je pense au moineau dans la cheminée.
Je tente d’asseoir ma pensée labile
et de redresser mes reins dans l’allée

samedi 16 novembre 2019

Souvenir d' Afrique 30


Un jour sans lumière


Un jour sans lumière,
épais et froid.
Dur à respirer.

Moi dans l’herbe agenouillée
j’écrasais les feuilles de sauge et de menthe
mouillée, et la mélisse qu’on ne voit pas.

Boire à grands traits cet air bosselé blanc
un zinc malléable ou bien un lac
et au fond la forêt qui tangue
noire déjà comme un vaisseau.

Quand vint la nuit, l’horizontalité fut tassée
d’un seul coup. Sous ce horion-là
toute l’étiologie de cette vision
sombra avec elle dans le champ.

Un transi sans raison y gît maintenant.