lundi 31 janvier 2022
Ce sont des bras
Ce sont des bras, penses-tu - branches basses
qui - je demande qui ?
- brassent et avivent
un feu froid, te localisent - t’acculent ? -
à l’extrémité de tes doigts. Peut-on prendre la main
après tendre la joue
à leur fouet ?
dimanche 30 janvier 2022
Nul besoin de tropes
Nul besoin de tropes où les fûts parlent
l'essentiel. L'interstice est aussi du langage.
La lumière perce lancéolée,
appelle-
la rai, et le vent pénètre peu.
(Si cinglée c'est que tu participas au
mouvement.)
samedi 29 janvier 2022
C'est bien cela
C'est bien cela, des
sous-bois denses,
des halliers serrés,
c'est ce que tu te prescris à toi-même ?
Le fagot du sol en perspective des yeux,
ordonnés par lui, entre des piliers des hêtres
et des grands charmes, il circonscrit une âme,
sylve, un lit de
syllabes,
et une extension volontaires. Deux dimensions
pour dénoncer derrière la lisière fortifiée
des stères empilés, ce qui n'a plus lieu d'être.
Sans parler du parement de ruches.
vendredi 28 janvier 2022
C’est quoi ces questions ?
C’est quoi ces
questions ? C’est qui ?
Qui parle ?
Les laies s’entrecroisent.
Allées séparatives des coupes - à angle droit
la forêt en coupe réglée - signent d’autres axes
d’égarement pour qui suit une obscure syntaxe.
jeudi 27 janvier 2022
Et les fougères
Et les fougères, leurs flammes élancent le sous-bois.
La tentation serait de chercher des sentences, tant
la forêt, sa verticalité gnomique,
son obscurité tressée,
nous enseignent. Ici pas de bruyère,
j’attends
seulement la raiponce bleue.
mercredi 26 janvier 2022
Je passe
Je passe dans ses bas-fonds inaudibles, alors même
que la forêt est le sommet de l’expression.
Des racines à la cime un monumental effort d’extraction des substances.
Tout en bas où nous sommes
la lie recycle tous les possibles
que les ronces préservent de leur austérité violette.
mardi 25 janvier 2022
Oh, c’est sans férir
Oh, c’est sans férir ! Passée la ligne flottante du
ruché,
j’entre dans la forêt. Ici pas d’irréparable,
on accepte tous les coups : fûts en tous sens
confrontés
les uns aux autres trament l’espace dense.
La forêt qui semblait plan s’avère perspective
intrinsèque. Cette perspective contrariée
ne requiert pas de mot : aucun schibboleth
car nul ne passe avec sa parole, mais c’est avec son corps
ployé, éprouvé
au flanc et à la face,
désarmé, lamentable. À corps perdu ou le corps regagné.
lundi 24 janvier 2022
Peur ?
Peur ? Ma
propension à la perplexité
me rend flexible, j’arbore l’esprit flou avec bravoure
au front sourcilleux de la forêt, et à la face de cet
obscur mystère de
rigueur et d’endurance
tu veux dire de
persévérance ?
Je fais face verticalement.
Je veux dire une forteresse inclémente
et tout à la fois miséricordieuse s’érige là, en odeur de sainteté
- humus et sève - le havre imprenable
qu’il me faut à chaque fois conquérir.
dimanche 23 janvier 2022
Gamme
Gamme en demi-tons et derrière elle l’heure n’est
pas à la guerre mais à la forge, mais aux prédispositions à
- où en
viens-tu ? Aux préparatifs de feux la lisière se prête,
prête à éclore, l’artificier s’exécute, la forêt, j’en ai
peur
j’y viens et je festonne.
samedi 22 janvier 2022
Des aimants
Des aimants colorés
disposés
en ligne régulière, un dégradé de bleus et verts
et jusqu’au mauve juste devant le front noir
de la forêt, cette butée,
aimantent le corps tout entier
qui accepte par là d’aller vers son excès.
vendredi 21 janvier 2022
(Pas plutôt mutiques ?)
(Pas plutôt mutiques ?).
À l’hivernage :
de multiples recluses sous le lest
dont la douce modulation des faces
fait une gamme pour malentendant.
Ce jeu d’enfant par-dessus mon épaule.
jeudi 20 janvier 2022
Et m’étonne.
Et m’étonne. J’écoute tonner la terre,
atteinte par l’arme - la hache, la même - qui brise en nous,
j’écoute ses tonnerres et ses débâcles, les râles, les
frottements
de la fermentation, les contorsions et les bouillons de la
germination :
en quelque sorte, l’expression du vivant
- la puissance est dans la durée - la sombre intelligence
(je dis sombre, car la fin m’est incompréhensible, alors
reste le procès dont l’examen dure une vie).
Je dis sombre car la nuit tombe.
À la lisière du champ les ruches sont muettes.
mercredi 19 janvier 2022
Un coup d’épée dans l’eau
Un coup d’épée dans l’eau la danse assassine,
(quelque chose pourtant l’innocente puisque le mouvement
vient d’ailleurs, de derrière - loin derrière, au-delà du
visage,
des nuages ou des voiles ? S’empalent ? -
c’est probablement à la surface l’eau qui respire)
la risée - ça n’est pourtant pas si drôle -. L’eau s’agite entre
les glaives,
au fond remue l’amas de feuilles glauques
quinefontplusqu’une - c’est sans césure - un corps à
l’usure, que la mort
nourrit, bave une
écume brève et ça glousse, ça moutonne au coude
à coude avec la glèbe. Tu dis ? Pour entendre tonner.
mardi 18 janvier 2022
Et puis le visage
Et puis le visage se troublant dans la lumière (faux
mouvement, faux raccord,
subtile danse des épées, des révélations fugaces).
On ne connaît pas la signification de cette image (de ces
mots) :
mais la satisfaction découle de l’exploration du contexte
et des strates de possibilités d’interprétation qu’elle/ils
présente/nt.
Tu dis ?
Pour entendre.
lundi 17 janvier 2022
Pâle Sébastien
Pâle Sébastien, c’est encore toi cette eau,
les nuages passagers, la dure matière de l’étain
noir des noues ? La dure matière du monde, et
la forge où tu t’escrimes, l’enclume où vient pauser
ta fragile, labile image.
dimanche 16 janvier 2022
Tu t’exposes
Tu t’exposes à filer l’eau comme un objet !
- un miroir par exemple, ou un bouclier -,
sa résistance hérissée
de javelots
- ou des fleurets - s’incorpore ton image altérable.
À quoi pensais-tu, la maintenant ainsi dans
les nuages ?
samedi 15 janvier 2022
Au lieu précis
Au lieu précis du transfert,
passagèrement fleurs ou flocons
d’une blancheur allégée par le tain
brandi en bouclier. D’étranges angons
pointent depuis l’envers.
Après l'accommodation, on rend compte
de frêles épées ou plutôt des fleurets -
mais non mouchetés - qui d’un coup
perforent la flaque de ciel étamée.
Qui peut encore faire face ?
vendredi 14 janvier 2022
Qu’est-ce qu’on a ?
Qu’est-ce qu’on
a ? La voiture garée
au bas-côté, elle échancre un peu l’herbe,
nous, longeant le talus bourbeux,
nos premiers pas sur le pré de janvier
puis de l’autre côté de la voie, dans le champ noueux.
Ici les corbeaux dictent l’essor
depuis les îlots d’éteules. L’eau
plisse le reflet de cirrocumulus qui l’enorgueillissent,
ou c’est moi, l’œil flatté par ces fleurs de coton
plus petites que mon petit doigt, et qui
m’anime.
jeudi 13 janvier 2022
Herbe
Herbe impavide, c’en est déconcertant :
brin à brin plus tenue dans l’effort
que toi, avec ton
solipsisme détaché.
Conjuguée pour le pré, elle se prépare
au départ que tu redoutes tant.
mercredi 12 janvier 2022
À la minutie
À la minutie l’horizon s’expose
et tout progresse vitesse
grand V.
L’hyperbole de l’herbe, tu poses le pied dessus
incidemment (mais consciemment) :
c'est une atteinte sans lendemain.
mardi 11 janvier 2022
Ce qui change
Ce qui change ça n’est ni l’aube
ni la nouvelle année, mais l’herbe
qui maintenant diverge.
L’ horizon applique sa courbe
aux bois sourcilleux.
lundi 10 janvier 2022
Le sol fuit
Le sol fuit avec l’eau qui bouleverse les lignes sans tarir,
brouille les pistes, éboule les pensées échafaudées
dans les arbres. Les chablis font un renversement
de valeurs : tu découvres les dessous de l’affaire
au détour du chemin. La boue les recouvre comme lave, les
éternise.
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