mardi 30 septembre 2025
Encore et toujours l’ubiquiste
Encore et toujours l’ubiquiste, le millepertuis,
troue le vert compact du fossé asséché sous le roncier.
Grandi et certain de son faîte, il étaye la timorée, la verveine,
qui s’évertue en mauve, et la douce, très douce nitescence même,
aimée de l’Adèle métallique qu’elle sertit
au sein de son capitule rayonnant [scabieuse « Knautie » des champs]
lundi 29 septembre 2025
Tout reverdit
Tout reverdit sauf la jacée qui sonore
diffuse son rose gracieusement. Un rire
fait trembler le pré adjacent.
Elle forme le bouquet.
Tout juste refleurie, la juste centaurée jacée
la rose hirsute coiffe l’amour naissant
d’un simple état des lieux – talus reverdis aussi –
de sa simple je suis comme je suis
échevelle la main à cueillir
ses ombres digitées
(une écarquillée)
cent t’aurai mieux qu’une
dimanche 28 septembre 2025
Le roncier fait le sorite
Le roncier fait le sorite, en somme
qui enserre dans ses sarments une sorte de vérité concernant l’attente
et la pérennité. Embrasse-moi pour toujours !
C’est là qu’une belle galante sans souci ravive en rose,
apporte son capitule – son capital fraîcheur –
splendeur dans l’herbe, dut-elle passer, [centaurée jacée]
elle persiste à vivre (jamais assez !)
samedi 27 septembre 2025
Buissonnant vert
Buissonnant vert, impénétrable à la lumière
(lumière, à nos yeux dramatique), plutôt inextricable, le roncier
est la ronce érigée en système,
un système dont seuls les tout petits animaux viennent à bout.
Bout touchant marcottant à tout va, va vite vite, furtif, et drageonnant encore,
et encore ! imaginons que nous ne bougions pas nous serions cernés,
cernée figure au bois dormant,
dormant parmi les nichées de la pie-grièche écorcheur, du troglodyte mignon, de l'accenteur mouchet, du merle et des fauvettes,
les nichées du hérisson et du muscardin nichant
(figure) elle aussi sous les sarments
les serments, les serrements de cœur, les errements les enlacements
ce mensonge de l’instant fruticuleux qui serait l’éternité
éternité le baiser ? serre-moi ! embrasse-moi !
embrasse-moi ! Buissonnant vert !
vendredi 26 septembre 2025
Qui prend qui ?
Qui prend qui ? Les tiges préhensiles
jetées vers nos mains nues,
nos mains engluées (des appâts plein la bouche)
la mouche qui ne quitte plus la jambe ?
baies noires sur la courbe descendante
à point nommé
nos mains engluées dans la contradiction :
si le roncier augmente notre fortitude, les mûrons
percent déjà la défense
jeudi 25 septembre 2025
Elle a son heure
Elle a son heure, son heur, elle claironne [ronce des haies]
et bée jusqu’au sol
non que je la veuille facile,
arc-boutée elle résiste à la prise
à nos doigts où jus et sang se mêlent
le millepertuis perforé en sous-main valide cette alliance
et nos inclinaisons
la fluette chandelière étincelle [verveine officinale]
mercredi 24 septembre 2025
Encore la chicorée.
Encore la chicorée. Elle parsème la berme du bleu porcelaine
de tasses à toute épreuve. Non des tessons.
Les certitudes de la fonte. L’intégrité
d’une larme de lait.
Encore une dernière, pour la route ?
La vipérine, sur les carres, talonne les hautes herbes.
En vague pionnière sur la place nette après la coupe,
l’épilobe opulent ondoie déjà.
mardi 23 septembre 2025
Le plantain comme un I
Le plantain comme un I face à l’indigence et déjà sur l’asphalte
il encense la rigueur.
La renouée est un napperon sur l’aride.
Au fossé, rose coulée de l’épanchement : lui n’est pas un happy end,
ni un épiphénomène. [épilobe en épi]
lundi 22 septembre 2025
À ses côtés elle constelle la pierre
À ses côtés elle constelle la pierre concassée des bermes,
s’étoile et trace bien loin de son port, la petite fertile, chère
aux oiseaux. Qui ne conviendra qu’elle garde pourtant le contact sûr
avec la réalité rugueuse, et l’étreint ? [renouée des oiseaux]
mais pas une main amie !
dimanche 21 septembre 2025
Un indéboulonnable présent
[Juste là sur la berme, entre chien et caillou,
inflexible (et opportun) salut]
Un indéboulonnable présent, avec les meilleures intentions,
cramponné à sa pauvre place. [grand plantain, plantain moyen]
Nous le piétinons sans qu’il s’émeuve
à nos pieds indifférent.
On ne cueillera pas sa tige aussi inflexible qu’un goupillon.
Il est là. Sa feuille froissée soulage nos vanités
samedi 20 septembre 2025
Un frisson à la lisière
Un frisson à la lisière. L’ortie cligne
et lui sourit de toutes ses dents,
sa feuille tremble furtivement.
C’est le strict alignement avec l’épi de la salicaire
qui lui confère sa tenue.
Juste là sur la berme, entre chien et caillou,
inflexible (et opportun) salut
vendredi 19 septembre 2025
Et dans la trame de cet autre
Et dans la trame de cet autre compagne des fossés.
Une bonne compagne, zélée, bel habitus.
Elle folâtre dans le fond, hirsute à l’enjouement contagieux [grande ortie]
grande bonne à tout faire, un atout dans la main non gantée la brûle
mais le calmant est là tout près aussi
à portée d’elle,
respire sa générosité, comme elle respire
jeudi 18 septembre 2025
Elle raye quand je passe mon œil assoupi
Elle raye quand je passe mon œil assoupi
(il regarde le déroulement monotone de la route
les verts étagés des bois, au-delà des prés)
dans la conscience nonchalante
une goutte de sa pourpre au plus près
inocule le feu, le mal est fait, la salicaire
fait le bâton dans la roue mais le feu aux poudres
et l’éperon ensanglante le fatras dense et contourné
de celle qui ne berce rien tant que l’indolence [berce commune]
Elle s’y connaît en brûlure, elle aussi.
Mais l’une rutile tout près de l’œil quand l’autre rococo
s’entend avec le soleil dans mon dos,
me tend sa main rugueuse et son assise rocaille :
aie confiance d’un air angélique et mielleux
laisse-toi faire
cueille le jour
et je suis prise dans sa lumière
mercredi 17 septembre 2025
Pense avec les mèches sanguinolentes
Pense avec les mèches sanguinolentes,
l’inflammation au fossé [salicaire]
la plus capable de transmuer l’eau en sang ? Insoluble
(quadrature du cercle), ou en feu ?
Allez ! réjouis-toi de tant ardeur !
mardi 16 septembre 2025
Pense avec l’attachante
Pense avec l’attachante
le simple lancer d’un épi simple à l’arme facile
fluette et ténue, si fluette qu’on n’y prend garde [aigremoine eupatoire]
sa ténuité peut beaucoup :
n’y résistent pas les acrimonies
lundi 15 septembre 2025
Celle-ci, grandeur discrète
Celle-ci, grandeur discrète,
feuillage de velours gris-vert
(une intrinsèque douceur tomenteuse et sans arrière-pensée)
petites fleurs blanc rosé
sa pâleur sourit aux égarés
aux désemparés en manque de suavité
apaise les quinteux et les rétifs [guimauve officinale]
dimanche 14 septembre 2025
Regarde sans toucher
Regarde sans toucher (celle-ci il faut l’écouter
et la voir pour croire à ce charme
le vert opérant comme appât, en arme bien acérée
ciselée pour tromper, non, plutôt pour te délester de tes illusions :
la ciguë te prend à ton jeu, ta survie ne tient plus qu’à ta présence d’esprit.
Seule ta finesse lui est opposable, pour une confrontation à armes égales.
Elle est sans compassion pour les indécis.
Si ton esprit est dans ton nez, tu pourras peut-être échapper à sa beauté
Mais celui qui y goûte : mal lui en prend.
Il ne faudra que quelques minutes à la conine
pour l’immobiliser là, définitivement,
au bord du chemin blanc
sans autre consolation que d’être là
et avec pour seule antidote les vibrations
des herbes sèches dans la lumière déclinante
elles regardent le cœur s’en aller
et il se pourrait que toutes l’envient
vendredi 12 septembre 2025
On s’inquiète de sa semblable
On s’inquiète de sa semblable, fatale
d’autant plus frétillante
que délestée de la pesanteur du scrupule
on redoute sa voie inéluctable
de précieuse sémillante qui ne pardonne pas [grande ciguë]
jeudi 11 septembre 2025
Entre chien et loup
Entre chien et loup c’est elle le fanal,
le falot qui te prend par la main et
son manchon incandescent irradie
sous tes pas sa serviabilité c’est par là
que la vie te va
sans lanterner t’emmène celle qui est là, en grand nombre,
pour frayer le sentier dans la nuit indifférente
mercredi 10 septembre 2025
paradent sur le replat
[Cent têtes – c’est son cortège
côté soleil – assèchent les larmes]
paradent sur le replat mêlées à l’ombelle des ombelles
la blanche la falote
ses trémulations insensibles [carotte sauvage]
sa courbe révérencieuse salue le passant
en lui touchant les doigts
regarde-moi
ne me touche pas
prends-moi vite !
pars avec moi
mardi 9 septembre 2025
Mais c’est l’autre
Mais c’est l’autre la fleur en tête, la meneuse
de cette curée sur l’ombre
elle a déjà traversé
et bêle de l’autre côté, belle et clarinée [marjolaine]
entête le soleil
Cent têtes – c’est son cortège
côté soleil – assèchent les larmes
lundi 8 septembre 2025
Là elle comble les fossés
Là elle comble les fossés
côté ombre en troupeau pressé
un trop plein de laines dégorge ses roses purpurins [eupatoire chanvrine, chanvre d’eau]
et moutonne vers l’orée du bois
dimanche 7 septembre 2025
Le vent se prend les pieds
Le vent se prend les pieds dans les gnomons
gros comme des barreaux de chaise et trop nombreux
– tous porte-ombres de directions éparses –
ces styles centrifuges l’excitent
pendant qu’il ressasse la leçon des massettes
et s’essaie aux contraires
attrape-moi si tu peux
samedi 6 septembre 2025
Vers la gravière
Vers la gravière me vient une
(très douteuse) question :
jusqu’où fustigeront-elles le ciel caillebotté,
et qui tient le manche ? [massette à feuilles larges]
Ou c’est le métronome qui
ponctue le temps
(la Parque n’est pas loin sa quenouille
tenue à l’envers comme un doigt levé)
comme un doigt cherche le vent
plutôt qu’intimer l’ordre, plutôt
que décompter l’instant





