samedi 29 mars 2025
à lever l’incomparable
à lever l’incomparable
présence réservée
- inqualifiable et impénétrable déprise -
la dormance (et sans garantie de reprise)
(à tel point qu’on oublie comment c’est,
parcourant ce paysage austère
par prudence et restriction, je m’émeus
des quelques signes de vie qui infirment la défection)
ce serait comme une énigme dont j’omets
chaque fois l’issue et le nom, ou plus exactement les noms divers
et variés : Galanthus nivalis
Corylus, Viola odorata, Primula vulgaris, Euphorbia helioscopia.
Donc le Sisymbre.
vendredi 28 mars 2025
Ce flottement
Ce flottement, un passif hiémal et explétif - ce nerienfaire -
je m’y étais habituée, dépouillée
de toute finalité, toute grâce aussi : il consistait
à écouter des frissons, des froissements
à faire sienne une optique brumale - plus suggestive
que brumeuse, évocatoire que fumeuse -
à errer sur la petite route du soliloque et des floches matinales
dans les talus, sur les guérets
à lever l’incomparable
jeudi 27 mars 2025
- non, pas exactement l’austérité
- non, pas exactement l’austérité,
mais le dépouillement,
(parce que rigueur et austérité sont réputées s’approcher
de la vérité des formes ?
Rendre compte d’un ordre et d’une beauté
immanents ? Faudrait-il que le monde soit à l’état de squelette
pour être envisagé ? Et risquer d’omettre le mouvement,
l’attraction, la force vitale ?)
Il est diversité.
Dépouillement et profusion, rigueur et aménité.
Variation, transformation.
Me voilà prête au débordement de cette vérité sur le pré.
Ou bien c’est le comble de mes atermoiements
- ne rien faire encore -
inclination à me laisser bercer - flotter/combler facilement -
par l’inanité au son du vent.
mercredi 26 mars 2025
- sa voix cruciale bien que fluette -
- sa voix cruciale bien que fluette - de grande rudérale
dégingandée
capable de beaucoup sinon de tout.
J’attends la rosette. Je devance les hastes inversées.
Et je préviens l’extinction, grâce à son nom qu’elle me tend,
sa voix pour sauver ma voix brisée
doutant de la reprise, ma voix
que l’hiémale austérité comblait
mardi 25 mars 2025
ce serrement initial
ce serrement initial qui trouve plus justement -
plus vitalement et sensiblement - sa pensée
que la pensée ensuite ne trouve ses mots, renchérit Heaney*).
Le Sisymbre survient apposant sa voix, son timbre
*Gérard Cartier, préface de Seamus Heaney, La lanterne de l’aubépine, traduction de Gérard Cartier, éditons Le TEMPS des CERISES, 1996, p. 14
lundi 24 mars 2025
Je suis prévenue.
Je suis prévenue.
Pourtant, je cherche la différence au bout des rameaux,
le détail qui dénote, le bourgeon novice.
Le chant de la mésange, l’ortie juvénile.
La ronce fait la morte, j’entreprends des pourparlers,
sachant que je serai bientôt perdante.
Les rats taupiers sont les tout premiers
à inscrire cette différence tant attendue.
Le chapitre LXX du capitulaire De Villis me fournit matière à échafauder.
Roquette, arroche - ou arronse, bonne-dame - cataire.
Souci, sauge, bette, sarriette, je mâche des mots médicinaux.
Sisymbre officinal ou Herbe aux chantres
- on l’a nommée Erysimum - s’apprête à sauver le poème
de l’enrouement (voire de l’extinction)
(je me gargarise avec son nom chantant, il valorise le serrement de gorge,
ce par quoi tout commence, disait Robert Frost,
dimanche 23 mars 2025
Dans une sorte d’instinct infaillible
Dans une sorte d’instinct infaillible de l’issue
- fatidique - :
la déliquescence juste après la fruition.)
Cette perspective qui n’offusque rien
me prévient simplement
comme pour un acte de consentement donné de moi à moi-même
je t’aurai prévenue ! Oui.
samedi 22 mars 2025
d’avance je sais que je m’adonnerai à cette excentricité
[d’avance je sais que je m’adonnerai à cette excentricité]
que je me réjouirai de l’incandescence - pâquerettes des myriades
étoilent le pré, je m’en remets déjà au pré -,
de l’exubérance des arbres.
Ce qu’insuffle cette turbulence alors qu’aujourd’hui
le froid retardant la mise à feu je me satisfais du végétement,
je dirais : dans l’appréhension de la jubilation imminente.
vendredi 21 mars 2025
Suis bien aise aujourd’hui
Suis bien aise aujourd’hui avec cette herbe rase
l’infrastructure juste suffisante, une base que recèle tout jardin
bien aise avec la lucidité de la haie sans aggravation de feuillages,
avec la brièveté des plantules, le rais clairsemé sur la rosette.
(Je sais que je céderai bientôt devant l’ardeur
et la prodigalité.
Que je regarderai ravie l’herbe élever l’horizon, les floraisons imager le temps,
les insectes ravager le silence,
d’avance je sais que je m’adonnerai à cette excentricité
jeudi 20 mars 2025
Pourquoi la métaphore pousse-t-elle ainsi,
Pourquoi la métaphore pousse-t-elle ainsi,
pourquoi cet empressement à verdir le monde ?
Elle nous enrôle dans son armée d’euphoriques
pendant que le gel, lui, par l'inflexibilité, accorde un délai,
scellant l’avancée comme la fin.
mercredi 19 mars 2025
ce tropisme, pour perdurer, se ressemer.
ce tropisme, pour perdurer, se ressemer.
Le gel le saisit en plein élan
comme pour temporiser.
Différer le départ. Stopper le transport prématuré.
Le mouvement initié est converti en prudence
en prudente inertie, encore que la danse latente
et le discernement des pierres en disent long
sur cette vie, rien qu’à voir leurs signatures fossiles.
Je suis sur un chemin étincelant
de pierres sonores
rénovées par le froid, entre les interstices desquelles
bouillonnent les tortillons des lombrics
aucune ineptie mais l’attente
la réserve prudente
c’est seulement mon incrédulité et ma perplexité
qui me font prendre la discrétion pour inanité.
mardi 18 mars 2025
avec toute la minutie glaçante de l’hiver.
avec toute la minutie glaçante de l’hiver.
Demeure une herbe rudimentaire
ainsi que le motif commun (comme
un sens commun) ou l’objectif universel,
ce tropisme, pour perdurer, se ressemer.
lundi 17 mars 2025
que l’issue réinvente en filets lumineux.
[ je viens
à la forge
à la force de l’œil
mater
la neige effilée ]
que l’issue réinvente en filets lumineux.
Lui, le perce-neige, dissout sa présence
et résorbe discrètement sa persévérance
dans la lente débâcle,
en illusionniste avéré.
Pfft ! évanoui ! résolu !
Il suit l’eau dérivée
les dérivations de tout son l’être
au motif indubitable
de la génération.
D’autres cristaux relaient ensuite, la nuit
l’étoilement généralisé
dimanche 16 mars 2025
se faisant jour -
se faisant jour -
laissant jour à rêver
les plus folles joies de
premières fois, d’images vernales
l’impensable croît alors avec ce lait
sur le feu du sol
la brûlure noircit les doigts
et les tissus, seul l’œil en réchappe
un faux-pas je suis dans sa fournaise
fourneige
que je traverse
moi aussi (mais dans l’autre sens) je viens
à la forge
à la force de l’œil
mater
la neige effilée
samedi 15 mars 2025
que la contemplation rénove
[Quelque chose est là vivant encore
indemne
malgré la rigueur]
que la contemplation rénove
comme il rénove l’œil, lui,
en bouquet poussé
à l’insu, à l’austère neige
candide, cristallin
comme un lys (plus économe)
(primeur sans compter pourtant) et sans calcul
qu’il perce
vendredi 14 mars 2025
de lait çà et là
[Un scrupule de galantamine dans le massif !
(à force de me regarder)
s’égoutte lentement mais sûrement sa pureté]
de lait çà et là
détonnant dans la grisaille
des fanes.
Détonnant non détonant.
Incrédule je regardais le perce-neige
transformer un semis aléatoire en sentier lacunaire, certes
mais sûr et prédicatif :
une utopie pointe à mes pieds et régénère la mémoration de l’issue.
Quoi ? Que suis-tu ?
Quelque chose est là vivant encore
indemne
malgré la rigueur
jeudi 13 mars 2025
La voici la dynamite !
La voici la dynamite !
Sous la forme de cette goutte dense
de trinitrine, prête à me faire danser,
elle me tient en joue.
Raison ou espoir ? Elle allège pourtant
tous les scrupules
- sur un point précis qu’elle pressent là -
de la gravité
superbement prophétique et menaçante.
Un scrupule de galantamine dans le massif !
(à force de me regarder)
s’égoutte lentement mais sûrement sa pureté
mercredi 12 mars 2025
(ce qu’une minuscule goutte
(ce qu’une minuscule goutte
suspendue au-dessus de l’hiver
- prétendue et pendante -
de beauté pure, en novice
pointant de-ci de-là
et tentant de rénover l’attention
peut receler d'énergie
elle le sait, elle en joue.)
mardi 11 mars 2025
Je rentre.
Je rentre.
(J’avance vers une autre issue, naturellement.)
Ici
où la bise brusque le charme et l’érable mêlés
revenue aux signes familiers - ce qui suffit pour une vie :
un lieu, une vision, un topique -
je vois le perce-neige, le moly d’Ulysse
sur lequel reposent raison et espoir
lundi 10 mars 2025
Ce qui s’avère
Ce qui s’avère en cette concession
sans bornes à l’expérience ?
La concrétion.
Forces et moments de merveilleuses hélictites mentales.
Des fleurs en quelque sorte, l’efflorescence concrète à l’instant
de l’étonnement, des petites bombes explosibles
trouvées dans le grand champ - inextricable -
des signes objectifs.
dimanche 9 mars 2025
le nez au vent
le nez au vent (tropistique levée)
Je suis l’irrépressible désir sans objet
l’heuristique approche, méthode comme une autre
qui fait trouver le chemin viable
dans le sillon - non le sillage - du rien
je file un courant d’air
j’entrevois l’issue naturaliste
dans les mottes.
samedi 8 mars 2025
Je subis
Je subis de plein fouet le jet de fétu.
Suis face au champ avec l’envie de ruer
me ruer à sa suite, à l’issue.
Je me prescris l’immersion, j’aspire au ballottement
avec Goniorhynchia boueti
- des bouées terrestres brasillant dans les rouleaux du temps -
j’envie l’indifférence - non l’apathie -
la légèreté le frémissement et l’émiettement