dimanche 29 mars 2020

Ascétique sur l'eau grise


Ascétique sur l'eau grise il m'a vue venir
contemplant quoi sur l'eau dure et froide
comme une plaque aciérée, la surface damassée,
un damas de ramages fins entrelacés de filaments
blancs à la dérive, un peu dénoués par les anneaux
concentriques, un peu dévidés comme si des soudures
se dilataient ? Quoi ? Certainement pas narcisse,
il scrute sa nourriture stoïquement pauvre, appauvri
par les vents, dommages dans ces plumes alaires auscultées,
dont la couleur s'émiette, et lui s'entête, comme je m'entête

à saisir non loin de lui une touffe d'iris

Turbidité qui n'est pas turpitude ici, fétidité de la terre glaise
des berges dans laquelle ont pourri les calames et les plastiques, mais
où ravivent les verts et les blancs ténus, presque translucides,
de premier printemps, de printemps hivernal, un novice primevert.
Sa dignité propagée à tout, en dépit du vent qui le déstabilise
et l'ébouriffe, comme en dépit des ondulations s'affirme ici
une platitude, une humilité, la constance ravivée au pied d'un héron
banal et concertant, d'une banale rivière dans la lumière austère.
Je ne donne pas congé ni à la lumière ni à la couleur, non.
Je suis confinée avec elles dans ce printemps malgré tout vivace

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